Archives de l’année : 2017


Boštjan Nedoh, Barbelé-Rasoir : Un Nouveau chapitre de l’Histoire politique du barbelé

Ce texte est la traduction française de la postface de la traduction slovène (éditions Maska) de mon livre Histoire politique du barbelé, Flammarion, Champs, 2009. Si je me permets de la publier ici, c’est qu’il ne s’agit pas d’une simple recension. L’auteur reprend, enrichit et surtout prolonge le propos du livre par des analyses très intéressantes du traitement réservé par l’Europe aux personnes y cherchant refuge, en particulier en relation avec la fermeture par des kilomètres de barbelés rasoirs de la frontière Slovène sud fin 2015. Je remercie donc vivement Bostjan Nedoh, la traductrice du texte, Ursa Planinsec, ainsi que Amelia Kraigher et l’Institut français de Ljubljana qui ont permis cette traduction. Télécharger le PDF   Tout au début de son œuvre monumentale LTI – Lingua Terti Imperii (La langue du IIIe Reich, 1947 ; traduite en slovène en 2014), Victor Klemperer, philologue allemand d’origine juive, explique les raisons pour lesquelles […]


La critique de l’expertise psychiatrique chez Foucault

Télécharger le PDF 1. La critique du niveau de savoir          « Des discours qui font rire1 » Le début du cours au Collège de France de 1974-1975 intitulé « Les anormaux » est une attaque en règle contre l’expertise psychiatrique. Le premier angle d’attaque choisi par Foucault est une sorte de preuve « par l’exemple ». Un peu à la manière du début de « Surveiller et punir » où il juxtapose la description du supplice de Damiens et le règlement d’une prison pour mineurs du 19e siècle pour en faire apparaître le contraste, Foucault fait la lecture de larges extraits de deux expertises psychiatriques, une de 1955 et l’autre de 1973. L’objectif de cette lecture n’est pas d’abord de faire comprendre quelque chose mais de provoquer un effet, et cet effet est évident, au minimum ces expertises font sourire. Une note de la publication du cours fait même référence « aux fréquents rires qui ont accompagné la […]


L’insertion des personnes condamnées : police ou politique ?

Ce texte est issu d’une intervention aux Journées internationales de la recherche en milieu pénitentiaire, Insertion et désistance des personnes placées sous main de justice, à L’Ecole Nationale de l’Administration Pénitentiaire, Agen, 2010 Télécharger le PDF   Introduction : Police et politique Le problème de l’insertion est habituellement présenté comme celui de la recherche d’un bon rapport entre l’économique et le social, c’est-à-dire entre la logique de l’échange marchand des biens et des services et la logique du lien social, de ce qui permet d’assurer la cohésion de la société. Et, d’une manière générale, on nomme « politique » le problème de ce rapport. La politique interviendrait pour régler le rapport entre l’économique et le social par une série d’instruments (législatifs, réglementaires, incitatifs etc.). Or, pour le philosophe Jacques Rancière, si l’on en reste là on rate, ou on oublie, la dimension proprement politique de phénomènes comme l’exclusion ou l’inégalité. Il ne […]


Pensée de la mort comme absolu et vitalité philosophique

Télécharger le PDF Il s’agit de s’interroger sur les rapports entre médecine, philosophie et santé, plus particulièrement sur la différence, voire l’incommensurabilité de deux pensées (et pratiques) de la santé : l’une que l’on pourrait appeler médicale, l’autre philosophique. Plus précisément, le questionnement portera sur la question de la mort, ou plutôt de la pensée de la mort, qui est par définition hors du champ d’opération technique de la médecine, alors qu’elle est le point culminant d’une certaine vitalité philosophique. Afin de déplier ce problème, partons d’une image de la médecine1. Image triple de la médecine comme une diététique des excès, une énergétique de la performance et une cybernétique de la normalité – médecine corrélative d’une triple santé de l’équilibre, de l’efficacité et de l’intégration. Ces trois dimensions sont descriptibles historiquement (généalogiquement aurait dit Foucault) et techniquement : – La médecine du régime provient de la médecine hippocratique de l’équilibre des humeurs […]


L’application des peines entre ennemi, citoyen, menace et usager

Article initialement paru  dans la revue Jurisprudence. Revue critique, numéro spécial, 2015, Université Savoie Mont Blanc Télécharger le PDF Face à la question redoutable du sens de la peine aujourd’hui, le premier réflexe serait l’abstention ou l’esquive tant les difficultés qu’elle pose semblent insurmontables. Il est pourtant intéressant de s’attarder un peu sur la nature de ce réflexe, les idées et sentiments qu’il suscite, parce que cela est plein d’enseignement. En effet, nous ne sommes pas embarrassés parce que nous ne trouvons pas de réponse, parce que la peine nous apparaîtrait dépourvue de sens tout court mais, au contraire, parce que plusieurs réponses, plus ou moins bien formulées, nous viennent pêle-mêle, que nous n’arrivons pas à ranger, à hiérarchiser. Autrement dit, le problème immédiat que nous pose le sens de la peine n’est pas celui d’une absence de signification mais, au contraire, d’une profusion contradictoire. Le problème que pose la […]


F… comme Facebook

Ces articles sont issus d’une rencontre avec Alain Damasio organisée par Guillaume Gourgues et Ouassim Hamzaoui le 29 juin 2012 à l’université de Grenoble. Les organisateurs avaient décidé de nous faire réagir sur un abécédaire maison, adapté à nos questions. La journée s’est révélée passionnante (au moins pour nous) et nous pensions en publier le résultat. Cela n’a pas pu se faire, je livre donc ici le résumé de mes interventions sur des sujets aussi divers que la virtualisation, la surveillance, la neutralisation ou la résistance. Dans les textes qui suivent, j’ai conservé autant que possible l’oralité de ces rencontres. Facebook, ce serait le système mondial automatisé d’une forme renouvelée de confession, telle que Foucault l’a pensée. C’est l’autoproduction de son individualité normalisée dans la relation avec un autre, ou des autres. Cet autre vis-à-vis duquel je me définis, ce n’est pas le prêtre, le médecin, le flic, le psychanalyste, […]