« La prévention de la récidive » ou les conflits de rationalités de la probation française


Résumé : La notion de « prévention de la récidive » apparaît désormais, sinon comme l’alpha et l’oméga de la politique pénale en France, du moins comme un impératif de plus en plus surplombant. C’est particulièrement visible dans les orientations imposées aux Services Pénitentiaires d’Insertion et de Probation (SPIP) ces dernières années. En s’appuyant sur un double ensemble de sources écrites (textes normatifs, brochures, rapports…) et orales (une quarante d’entretiens avec des professionnels), cet article propose d’abord un repérage distinguant six rationalités structurantes du champ de la probation française. Sur cette base, il entend ensuite montrer que l’usage institutionnel de la « prévention de la récidive » a pour effet de recouvrir les contradictions et torsions qu’implique l’articulation de registres d’action hétérogènes. Il soutient alors la thèse selon laquelle cette notion non seulement ne produit qu’une clarification rhétorique des missions, qui nourrit plus qu’elle ne résout la confusion des pratiques, mais permet surtout de faire fonctionner un nouvel arbitraire de la justice, typiquement postmoderne.

Article publié avec Fabien Gouriou et Grégory Salle dans Champ pénal/Penal Field, vol. XI, 2014

Lien vers la page


A propos de Razac

Après des études de philosophie à l'Université Paris 8 dans les années 90 et une période de production d'essais de philosophie politique sur des objets contemporains (le barbelé et la délimitation de l'espace, le zoo et le spectacle de la réalité, la médecine et la "grande santé"). J'ai travaillé pendant huit ans comme enseignant-chercheur au sein de l'Administration Pénitentiaire. C'est dans cette institution disciplinaire que j'ai compris ce que pouvait signifier pour moi la pratique de la philosophie, c'est-à-dire une critique des rationalités de gouvernement à partir des pratiques et dans une perspective résolument anti-autoritaire. Depuis 2014, j'ai intégré l'université de Grenoble comme maître de conférences en philosophie. Je travaille sur la question de l'autorité politique, sur les notions de société du spectacle et de société du contrôle. J'essaie également de porter, avec les étudiants, des projets de philosophie appliquée déconstruisant les pratiques de pouvoir. Enfin, nous tentons de faire vivre un réseau de "philosophie plébéienne", anti-patricienne donc, mais aussi en recherche de relations avec tous nos camarades artisans de la critique sociale.

Laissez un commentaire